L'opération Bedzed a été un des premiers écoquartiers européens, et à ce titre une expérience pilote dont il est fondamental de pouvoir retirer des enseignements, à l'heure ou construire durable devient une nécessité.
Le village a été livré en 2002, après 2 ans de travaux. Le projet avait été initié à la suite d'un appel d'offre par la ville de Sutton en 1998.
Peabody Trust et Bioregional remportent le marché et confient la conception du quartier à l'architecte Bill Dunster.
D'une superficie de 1.7ha, BedZed accueille 82 logements et 2500m² de commerces et services.
L'ambition affichée du projet est de devenir une opération exemplaire tant en terme de consommation d'énergie que d'objectifs environnementaux et de mixité sociale.
En 2009, Bioregional a publié les résultats de son enquête auprès des habitant permettant d'évaluer les réussites et les failles de cette première expérience. Voyons un peu.
Les principes d'urbanisme ayant présidé à la conception du BedZED
- Une localisation en lien avec Londres et sa banlieue, afin de réduire le besoin de recours à la voiture et l'extension des infrastructures. Le quartier est en effet très bien desservi par les transports en commun (2 gares, 1 tramway et 2 lignes de bus.)
- Des formes urbaines favorisant la densité.Il y a en effet 220 habitants dans le village, soient 14 700 hab/km², ce qui est comparable, en France, à la Ville de Malakoff, en région parisienne. Le parti pris est de mutualiser ainsi les équipements et infrastructures pour améliorer leur rentabilité environnementale. Cette densité élevée est également une réponse à l'étalement urbain.
- Des formes urbaines à taille humaine.
- Les bâtiments sont en R+2,
- les logements sont souvent pourvus de jardinets de 8 à 25 m²,
- les entrées des appartements et maisons ménagent un agréable sentiment d'intimité grâce à des systèmes de décalage les unes par rapport aux autres
- enfin, environ 29% de l'espace est constitué d'espaces verts
- Une mixité des usages, afin que les habitants puissent, autant que possible, trouver sur place les équipements nécessaires à la vie quotidienne (emplois, commerces, vie sociale).
- Le site accueille ainsi, outre des bureaux, un café, une garderie, un centre médical et une pharmacie ainsi qu'une "salle communale"
- De plus,
- Une architecture durable, s'appuyant sur la technique et le bon sens pour réduire l'empreinte écologique de ses occupants. Les bâtiments se caractérisent ainsi par :
- le bon usage de l'environnement (orientation des logements plein sud, utilisation des surfaces au nord pour les bureaux...)
- des serres importantes, orientées plein sud et permettant de bénéficier de la chaleur du soleil,
- un système de ventilation passive, devenue, avec ses cheminées colorées, l'emblème de BedZed,
- l'emploi de matériaux locaux ou recyclés,
- la mise en place de panneaux photovoltaïques ou de systèmes de récupération des eaux de pluie.
- En outre, les logements ont été équipés, avant l'arrivée de leurs occupants, de matériels économes en énergie (ampoules basse consommation...)
- une conception réduisant la place de la voiture dans la Ville.
- il n'y a volontairement pas de places de parking attribuées aux logements. De plus, garer sa voiture coûte cher (environ 250€/an) et s'avère peu pratique, les zones de stationnement étant reléguées en périphérie du quartier
- De nombreux systèmes sont prévus pour garer les vélos dans et en dehors des bâtiments, et favoriser ainsi leur usage.
- Enfin, le quartier avait prévu des équipements à même d'encourager les personnes souhaitant délaisser leur voitures
- pool de voitures disponibles, à prendre selon ses besoins
- mise à disposition infrastructures pour voitures électriques
- Une conception intégrant dès le départ des équipements environnementaux
- bacs à composts, poubelles de tris, bacs sont mis à disposition des habitants
- tous ont accès à des jardins ouvriers en bacs, qui peuvent être utilisés, entre autre, pour des cultures potagères, afin d'encourager le locavorisme.
- Une mixité sociale voulue
- Dès le départ, les habitants ont été choisis selon les critères suivants
- 1/3 d'accession à la propriété pour des membres des classes aisées
- 1/3 de copropriétés des classes moyennes
- 1/3 de logements sociaux
En 2009, après "sept ans de réflexion", un bilan positif, plein d'enseignements pour de futurs écoquartiers.
- La localisation du quartier évoque chez les habitants un sentiment ambigü
- d'une part, ainsi que le voulaient les concepteurs, l'excellente liaison avec le réseau de transports en commun est bien perçue. 61% des personnes travaillant utilisent le réseau. Cela permet de ramener la proportion de personnes allant travailler en voiture de 45% environ, dans les quartiers adjacents, à 17% a BedZED. D'un point de vue environnemental, c'est donc un succès.
- Malgré tout, cette même localisation est citée comme étant le premier motif de mécontentement des habitants. En effet, ils ont le sentiment de ne pas être en ville mais en banlieue, éloignés des équipements et facilités à disposition dans les centres urbains. Ce sentiment nous ramène à l'importance d'une reconstruction, lorsque c'est possible, de la ville sur elle-même.
- Les formes urbaines, ainsi que l'architecture, ne posent pas de problème. Les gens sont satisfaits de leur logement, de leur quartier, qu'ils trouvent agréable et convivial. La luminosité des logements, grâce aux baies vitrées, est particulièrement citée. De même, les consommations énergétiques sont particulièrement peu élevées. Les sondages font cependant remonter des problèmes de maintenance. Il est certain que ce sera l'un des enjeux des prochaines années que de parvenir à conserver le confort des habitations en renouvelant et rénovant les équipements et espaces le nécessitant. C'est à ce prix que le quartier vivra et passera d'une expérience pilote passionnante à un lieu de vie et de quotidien autonome, durable.
- La place réservée à la voiture dans le projet est un aspect moins positif du projet.
- En effet, cette démarche militante a été difficilement acceptée par les habitants, qui se plaignent des complications et du coût occasionné. Beaucoup envahissent les quartiers adjacents, où se garer est gratuit, ce qui crée des tensions. Cette expérience tendrait à montrer que vouloir contraindre les utilisateurs à délaisser les voitures n'est pas une bonne démarche. Des actions pédagogiques, progressives et sur le long terme, seraient peut-être plus efficaces?
- De même, le coût d'une voiture électrique étant encore très élevé, peu de gens s'en sont équipé (hormis les concepteurs!) et les nombreux panneaux voltaïque sont restés inutiles, malgré l'investissement qu'ils reprsentaient
- Enfin, beaucoup sont réservés sur l'utilisation des vélos, se plaignant que les systèmes de stationnement ne soient pas assez sécurisés.
- En revanche, certaines alternatives proposées aux habitants ont rencontré un bon succès. Elles n'ont pas remplacé la voiture mais ont réduit son usage. C'est pourquoi, si les foyers habitant le BedZED sont aussi nombreux que leurs voisins être équipés avec au moins une voiture, ils sont bien moins à en avoir deux ou plus. Cela est dû à la qualité de l'offre en transport en commun, dont nous avons déjà parlé, mais aussi au pool de voitures mis à disposition de ceux qui le souhaitent. Plusieurs ménages peuvent ainsi partager un même véhicule.
- Le bilan environnemental, qui dépend lui aussi en grande partie de la volonté des habitants, est également en demi teinte
- les résultats en tri sont meilleurs que la moyenne nationale au Royaume Uni.Cependant, on note un essoufflement, notamment en ce qui concerne l'usage du bac de compost. De nombreuses personnes, par ailleurs, trient mal ou insuffisamment, et ne semblent pas être au courant des équipements mis en place. Il semble donc qu'il soit nécessaire de relancer des action pédagogiques régulièrement, afin d'entretenir la "flamme des débuts"
- L'expérience des jardins familiaux a été appréciée, même si peu de personnes en ont réellement profité pour produire aux même leur nourriture. Ces espaces ont davantage été vus comme des points de convivialité de rassemblement de partage. Cependant, dans les mois précédant le sondage, des actes de vandalisme laisse craindre que ces lieux ne soient délaissés, voire ne deviennent problématiques. Peut-être sera-t-il nécessaire de revoir leur gestion?
- Enfin, le bilan en terme de mixité sociale est très positif. Les gens trouvent le quartier convivial, aiment utiliser les équipement, les espaces publics arborés. Ils se connaissent bien, puisqu'en moyenne chaque habitants connaît 20 de ses voisins. (dans les quartiers avoisinants, ce même nombre est de 8).
Sources :
Enquête par bioregional ( BedZED 7 ans après (en anglais))Synthèse sur l'expérience BedZED par la Ville de Lausanne
Caractéristiques du projet BedZED par Carfree
Traits Urbains n°10, Octobre 2006, "Retour à BedZED 5 ans après"
Urbanisme Durable - BedZed la vitrine des possibles - partie1
Urbanisme Durable - BedZed la vitrine des possibles - partie 2
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